Au Canada, Carney joue la survie de son gouvernement sur son budget
Le sort du gouvernement canadien tient à un fil avant le vote lundi par le Parlement sur le projet de budget déposé par le Premier ministre libéral Mark Carney, qui en cas d'échec devrait convoquer de nouvelles élections.
Élu pour faire face à Donald Trump et ses politiques protectionnistes, le Premier ministre doit rallier deux députés d'opposition - ou provoquer des abstentions - pour faire adopter ce budget, qui prévoit de doubler le déficit pour relancer l'économie du Canada.
Les libéraux, dont le gouvernement est minoritaire, ont reçu un premier signal positif avec l'annonce lundi que la seule élue du Parti vert, Elizabeth May, voterait en faveur du budget.
Mark Carney, ancien banquier central, affirme que le projet de budget, axé sur le lancement de grands projets d'infrastructures, est une réponse "audacieuse" aux bouleversements économiques mondiaux et aux attaques américaines.
Les politiques de Donald Trump, qui a imposé des droits de douane à son allié et récemment stoppé toutes les négociations commerciales bilatérales, frappent déjà durement le Canada, faisant grimper le chômage et mettant sous pression les entreprises dans des secteurs cruciaux (automobile, aluminium, acier).
"J'ai de bonnes nouvelles", a lancé lundi le chef du gouvernement devant le Parlement, à Ottawa. "On crée des emplois et le taux d'inflation baisse", a-t-il insisté.
Les prix à la consommation, publiés le même jour par Statistique Canada, font en effet état d'une diminution de l'inflation, qui a atteint 2,2% en octobre.
Mais les droits de douane américains et l'incertitude qu'ils créent "coûteront à la population canadienne autour de 1,8% du PIB", avait affirmé la semaine dernière Mark Carney.
- Les libéraux optimistes -
Le budget proposé par Ottawa prévoit de quasiment doubler le déficit pour 2025-26 (prévu à 78,3 milliards de dollars canadiens, soit environ 48 milliards d'euros), ce qui a attisé les critiques des partis d'opposition.
Le chef des conservateurs, Pierre Poilievre, a assuré que les 143 députés de son parti voteraient contre ce budget en expansion, qu'il qualifie de "budget carte de crédit".
Le Bloc Québécois, parti indépendantiste (22 sièges), votera également contre.
Le Nouveau parti démocratique (gauche, 7 députés), qui a souvent soutenu par le passé les gouvernements libéraux, a critiqué un budget ne soutenant pas assez les travailleurs, mais pourrait hésiter à forcer de nouvelles élections, après avoir sombré lors de celles d'avril.
Quelques heures avant le vote, plusieurs élus libéraux ont assuré être optimistes. "Absolument personne ne veut nous renvoyer aux urnes", a ainsi estimé le ministre de la Justice, Sean Fraser.
"Je n'ai pas cherché de local pour faire campagne, je suis presque certain que nous serons encore ici plus tard cette semaine", a renchéri le député Sean Casey.
Les sondages montrent qu'une majorité de Canadiens ne souhaitent pas de nouvelles élections aussi tôt après les dernières. Et 52% d'entre eux approuvent l'action de Mark Carney.
F.De Luca--GdR