

Tour d'Italie: Del Toro en rose, aubaine ou problème pour UAE ?
La prise spectaculaire du maillot rose dimanche par Isaac Del Toro, premier Mexicain de l'histoire aux commandes du Tour d'Italie, illustre une nouvelle fois la toute puissance de l'équipe UAE mais pourrait aussi virer au casse-tête pour la formation des Emirats.
Lundi, lors de la deuxième journée de repos, le jeune prodige de 21 ans avait tout le temps pour bichonner son maillot avec lequel il s'élancera en dernier mardi lors d'un contre-la-montre de 28 km entre Lucques et Pise.
Dans l'après-midi, il a seulement participé avec son leader Juan Ayuso et leur directeur sportif Joxean Fernandez Matxin à une visioconférence de presse chaotique avec des problèmes de liaison, du larsen et des questions perdues dans la traduction.
Installé entre Del Toro et Ayuso, qui s'ennuyait ferme au point de faire voler un avion en papier, Matxin a assuré que "le plan qui est de gagner le Giro ne change pas" et que la situation pour son équipe, avec quatre coureurs dans les neuf premiers au général, était "parfaite".
Quant au leadership, il a ajouté: "Juan est évidemment le leader, tout comme Adam" Yates qui fait figure de plan B en cas de défaillance d'Ayuso, la carte maîtresse.
- "Situation privilégiée" -
En soi, la situation de départ n'était déjà pas forcément si facile à gérer puisque Yates, troisième du Tour de France en 2023, pourrait lui aussi revendiquer un rôle de leader dans une formation qui regorge de talents.
Mais voilà que l'équation se complique encore avec l'irruption de Del Toro, simple équipier au départ, à la tête du classement général. Seulement battu par un Wout Van Aert renaissant dimanche dans l'étape des chemins blancs, il possède une avance conséquente de 1:13 sur Ayuso, son dauphin, et 2:01 sur Yates, neuvième.
De quoi rabattre les cartes ?
"Non", a assuré Del Toro dès dimanche soir. "Pour moi Juan et Adam restent les leaders. Ils ont déjà prouvé qu'ils étaient capables de faire le job sur une course de trois semaines, alors que c'est une nouvelle expérience pour moi", a expliqué le jeune homme dont c'est seulement le deuxième grand Tour après la Vuelta l'an dernier.
"Si Juan et Adam ont de bonnes jambes, je vais rouler pour eux sans hésiter, même avec le maillot rose sur le dos", a-t-il même insisté.
Lundi, il a ajouté que "le plan de garder le maillot rose dans l'équipe" n'avait pas changé. Quant à Ayuso, il a, comme Matxin, évoqué la "situation privilégiée" de l'équipe qui oblige, selon lui, les formations adverses à se découvrir.
- Comme Visma en 2023 ? -
Reste que le doute est permis de savoir si cette entente cordiale va durer dans une équipe où, lorsque le gros matou Tadej Pogacar n'est pas là, les souris ont tendance à s'entre-dévorer. Ou si UAE va rencontrer un scénario comme celui vécu par Visma en 2023 sur la Vuelta. La direction de l'armada néerlandaise avait alors dû trancher, après quelques jours de gros flottement, pour laisser la victoire à Sepp Kuss, équipier comme Del Toro, plutôt qu'à Jonas Vingegaard et Primoz Roglic.
Parce que l'histoire du cyclisme est remplie de rivalités internes. Parce que Juan Ayuso est déjà tombé deux fois dans ce Giro et a dû se faire poser trois points de suture sur son genou dimanche soir après avoir chuté sur le gravier.
Mais aussi parce que Del Toro est un crack, vainqueur en 2023 du Tour de l'Avenir, qui semble marcher dans les pas de Pogacar, dont il partage quelques caractéristiques.
Jusqu'où peut aller le natif de Basse-Californie qui se contente pour l'instant de dire qu'il vit un "rêve éveillé" et qui se découvre encore lui-même ?
Le chrono de mardi n'est probablement pas assez long pour chambouler la hiérarchie et les étapes suivantes sont plutôt plates. Il faudra donc sans doute attendre les montagnes de la troisième semaine pour le voir céder son maillot rose. Ou pas.
F.Piras--GdR