

Le sauvetage de Credit Suisse continue de faire des remous avec les litiges devant les tribunaux
Le sauvetage de Credit Suisse continue de faire des remous plus de deux ans après sa chute face au flot de plaintes devant la justice, saisie pour trancher sur l'épineuse question des bonus et l'indemnisation des actionnaires.
Vendredi, deux annonces se sont succédé entre d'un côté le ministère des finances qui a dit déposer un recours contre une récente décision de justice remettant en cause ses mesures concernant les bonus et, de l'autre, le tribunal fédéral qui a rejeté une demande d'indemnisation d'un couple qui avait subi de lourdes pertes.
Le sauvetage de Credit Suisse en mars 2023 a été un énorme choc pour le pays alpin. L'établissement connu pour avoir financé l'essor du rail en Suisse au XIXème siècle était la deuxième plus grande banque du pays et une des trente banques au niveau mondial considérée comme trop importante pour faire faillite.
Les autorités suisses avaient dû voler à son secours et avaient négocié son rachat par sa concurrente UBS. Mais si ce sauvetage à coup de mesures exceptionnelles a permis d'éviter une crise majeure, il n'en a pas moins fait de nombreux mécontents, notamment chez les actionnaires.
Les actions de Credit Suisse avaient été rachetées à 76 centimes par titre, à la stupeur des petits porteurs qui avaient vu leurs économies fondre.
Vendredi, le tribunal fédéral a tranché sur la plainte d'un couple qui réclamait 54.600 francs suisses (58.519 euros) à la Confédération en raison des pertes subies.
Le couple a expliqué avoir acheté 38.000 actions Credit Suisse le 10, 13 et 15 mars 2023, soit pour plus de 80.000 francs.
A ces dates, le titre vacillait dans un mouvement de panique sur les marchés. Le couple les avaient ensuite revendues avec une lourde perte le 20 mars, au lendemain de l'opération de sauvetage, affirmant qu'il n'aurait pas acheté ces titres "sans les déclarations rassurantes du Conseil fédéral en décembre 2022 et mars 2023" sur la situation financière de la banque. Le tribunal fédéral a rejeté leur demande.
- Litige sur les bonus -
Avec le sauvetage de Credit Suisse, le ministère des finances avait, à la demande du gouvernement, ordonné la réduction ou suppression des rémunérations et bonus dans les échelons les plus élevés de la banque, au coeur de vives critiques.
Il avait imposé leur suppression totale pour les membres du plus haut niveau de la direction de Credit Suisse, une réduction de 50% pour les cadres du niveau immédiatement inférieur et de 25% pour ceux du niveau suivant.
Mais la semaine passée, le tribunal fédéral a jugé cette mesure "illicite" pour plusieurs raisons, entre autres parce ces rémunérations variables constituaient, selon lui, "des prétentions garanties par l'employeur en vertu d'un contrat de travail".
Ce tribunal avait été saisi par douze cadres qui ne faisaient pas partie "du plus haut niveau" de la direction. Dans sa décision, le tribunal avait souligné que cette suspension des bonus et rémunérations variables concernaient environ "un millier de personnes" au sein de la banque, dont "quelques-unes" se sont portées en justice.
Le ministère a annoncé vendredi qu'il va faire recours, estimant que ce tribunal "n'a pas tenu compte d'éléments essentiels dans son interprétation" du droit suisse, "notamment en ne prenant pas en considération les circonstances exceptionnelles qui ont conduit à la reprise du Credit Suisse".
Au centre d'une vive polémique, les bonus des banquiers sont un des grands enjeux de la réforme que prépare actuellement le gouvernement suisse pour durcir la règlementation bancaire.
Plusieurs affaires sont en cours suite au sauvetage de Credit Suisse. En septembre, LegalPass, une start-up à Lausanne qui représente plus de 3.000 anciens actionnaires, a exigé que la justice procède à une réévaluation du prix de rachat.
De nombreux investisseurs institutionnels ont également saisi la justice concernant les obligations dites AT1, des instruments financiers complexes, dont la valeur avait été ramenée à zéro.
C.Neri--GdR