

De la vive à la punaise de lit, ces "bestioles" qui irritent les urgences
Rascasse, vive, scorpion ou encore punaise de lit: le congrès des professionnels de la médecine d'urgence à Paris s'est penché sur ces "bestioles", sources de défis sanitaires et logistiques méconnus.
"Vipère, veuve noire, scorpion, j'ai tout ça dans mon secteur", établit Pierre-Alexis Balaz, médecin urgentiste qui ne travaille pas dans un désert lointain, mais au bataillon de marins-pompiers de Marseille (BMPM).
"Si des gens veulent sortir...", prévient-il devant une assistance d'une centaine de personnes, avant de projeter sur grand écran des photos de nécroses "bien dégueulasses", comme il le dit. C'est un patient venu consulter sept jours après avoir été piqué par une araignée-violon. "Certaines nécroses peuvent aller jusqu'à l'amputation", insiste-t-il, ce qui n'est pas le cas ici.
Lucas Iglesias, référent pédagogique du Centre hospitalier de la côte basque (CHCB), est venu parler vive, rascasse et autres désagréments marins. Après son intervention au micro, les joies de la baignade riment avec "blessures émergentes".
Comme celles occasionnées par la physalie, confondue à tort avec une méduse. De couleur bleue-violacée, son aspect gonflé et translucide lui vaut sa dénomination plus visuelle de "vessie de mer". Lucas Iglesias rappelle que ses filaments, vecteurs de brûlures et venin, vont jusqu'à 50 m de long.
- "Risque de noyade" -
"En trois mois en 2011, 885 personnes qui en ont souffert ont été répertoriées par le centre anti-poison de Bordeaux (selon l'étude faisant référence, NDLR), c'est très douloureux et la cicatrisation va de quinze jours à trois mois", déroule l'urgentiste. Il pointe "un risque de noyade" quand le nageur "perd le contrôle" sous l'effet de la douleur.
Lucas Iglesias ventile les conseils: l'urgentiste doit "se protéger avec des gants" quand il intervient, il faut faire "ressortir les filaments avec de la mousse à raser" ou les "gratter avec une carte bancaire, par exemple". "Il faut laver à l'eau de mer, l'eau douce active le venin", éclaire-t-il avant de recommander aux surfeurs "la combi, même s'il fait chaud et beau".
Le port des méduses, des chaussures de mer, s'impose dans les esprits après sa présentation des dommages causés par la rascasse, poisson des fonds rocheux, ou la vive, poisson des fonds sableux, pourvoyeurs de piqûre/brûlure ou venin. Sans oublier les dégâts chez les pêcheurs et les cuisiniers qui les manipulent sans gants.
Pour ne pas trop plomber l'ambiance, les intervenants aèrent leurs exposés avec des pincées de pop-culture. Les pochettes du célèbre groupe de hard-rock Scorpions ponctuent ainsi le diaporama de Pierre-Alexis Balaz quand il aborde ce danger à dard dorsal.
Hugues Lefort, médecin urgentiste militaire à Marseille, s'appuie sur une photo de Clint Eastwood, Lee Van Cleef et Eli Wallach, trio d'acteurs du film culte "Le bon, la brute et le truand".
- "Le truand" -
Ce formateur démontre qu'il faut rester aussi vigilant devant les "morsures et compagnie", porteuses d'infection potentielle ("Le truand"), que confronté à une plaie nette ("Le bon") ou "une brûlure ou un écrasement" ("La brute").
L'assistance pousse des "oooh" d'étonnement quand David Ringot, de la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), révèle que "un à deux véhicules" de ses services sont "infestés par semaine" par des punaises de lit, après des interventions.
"En cas d'infestation massive d'un lieu où nous intervenons, les punaises de lit adultes sortent de leur cachette, peuvent grimper sur nos sacs, nos uniformes, ou sur les patients, et se retrouvent dans nos véhicules", détaille-t-il.
C'est un parcours du combattant, digne d'un film catastrophe hollywoodien, pour décontaminer ensuite hommes et matériels des services de secours. Les équipements passent par une remorque frigorifique à -20° (jusqu'à 72 heures) ou par un traitement insecticide.
Le matériel électronique, qui ne supporte ni l'un ni l'autre, est inspecté à l'oeil nu. "Quand on la voit, on coupe en deux avec des ciseaux la punaise de lit, de la taille d'un pépin de pomme", raconte tranquillement le vétérinaire en chef, référent des questions biologiques.
pgr/ito/tes
E.Barbieri--GdR