

Eboulement en Suisse: du mieux mais la prudence reste de mise
Le lac artificiel qui s'est formé contre un barrage de millions de tonnes de gravats de roche et de glace qui ont dévalé la montagne et détruit un petit village, commence à s'écouler et fait baisser le risque d'une inondation en aval de la vallée du Lötschental, l'une des plus belles du sud de la Suisse.
"L'évolution est positive mais nous restons prudents", a résumé Stéphane Ganzer, le chef du département de la sécurité du canton du Valais, lors d'un point de presse, en présence de la présidente de la Confédération helvétique, Karin Keller-Sutter.
Jeudi matin, les autorités envisageaient encore une catastrophe, à savoir une rupture brutale du barrage naturel de gravats. Les eaux du lac artificiel, qui continuent de grossir, auraient alors inondé la vallée.
Mais au fur et à mesure des vols de reconnaissance et des observations, les autorités ont constaté que l'eau du lac artificiel, qui a recouvert ce qui restait debout des maisons du village de Blatten, commençait à se trouver un chemin par-dessus le bouchon de gravats qui bloque la rivière Lonza sur plus de deux kilomètres.
Cet écoulement "nous rend optimiste et nous fait penser que l'eau trouve un bon chemin jusque dans la partie encore dégagée de la Lonza", a expliqué Christian Studer, du Service cantonal des dangers naturels.
Pour autant, les travaux de pompage de l'eau du lac ou de déblaiement n'ont toujours pas pu commencer, le terrain restant beaucoup trop instable en particulier sur les flancs de la montagne.
La vallée du Lötschental s'étend sur un peu moins de 30 kilomètres et compte quelque 1.500 habitants. C'est un endroit réputé pour la beauté de ses paysages dominés par les cimes enneigées, ses petits villages traditionnels et ses chemins de randonnées spectaculaires. Mais son visage est changé pour toujours.
- Un seul disparu -
Les autorités restent en alerte et les communes situées en aval de l'éboulement, y compris dans la vallée du Rhône, se préparent à une éventuelle évacuation. Des digues ont aussi été installées.
Pour l'heure, cet événement exceptionnel n'a fait qu'un disparu, un homme de 64 ans de la région. Les recherches interrompues en raison des risques que cela aurait fait courir aux sauveteurs devraient pouvoir reprendre incessament, ont indiqué les autorités.
Les 300 habitants de Blatten ont été évacués dès le 19 mai.
"Cela montre l'importance des alertes et des interventions précoces", s'est félicitée Clare Nullis, porte-parole de l'Organisation météorologique mondiale (OMM) lors d'un point presse à Genève.
"Le paysage ne sera plus jamais le même. Le village ne sera plus jamais le même, mais c'est un exemple de la façon dont nous pouvons utiliser les prévisions et les alertes pour sauver des vies", a-t-elle souligné, tout en rappelant que de nombreux pays moins riches que la Suisse n'avaient pas les moyens de le faire.
L'OMM a lancé un vaste programme pour s'assurer que partout dans le monde, la population pourra bénéficier de moyens d'alerte précoce pour échapper aux catastrophes météos.
- Pourquoi ? -
La quantité de roche et de gravats qui a dévalé la montagne mercredi vers 15H30 (13H30 GMT) est tellement importante que les sismographes du pays l'ont enregistré. A la place du glacier du Birch, entraîné par la chute des roches qui le surplombaient, on voit un trou béant sur le flanc de la montagne.
Les experts interrogés par l'AFP pensent que le dégel du pergélisol dans les fissures de la roche a probablement joué un rôle dans la déstabilisation de la montagne du petit Nesthorn qui dominait le glacier.
Matthias Huss, directeur de l'Observatoire suisse des glaciers (GLAMOS), espère que cela attire l'attention sur le sort des glaciers et de l'impact du changement climatique, même s'il faudra de longues études pour déterminer s'il y a un lien direct avec cet événement exceptionnel.
"Il faut souvent qu'une catastrophe majeure se produise avant que les gens réalisent qu'il se passe quelque chose", explique t-il à l'AFP.
"C'est très tangible. La destruction d'un village entier est facilement compréhensible pour tous. Des gens y vivent depuis des centaines d'années et tout a été effacé en quelques secondes".
L.Moretti--GdR